Je t’ai déjà parlé de Lily, Lily c’est la petite cocotte de mon amie Julie, une grande amie du secondaire avec qui j’ai fait au moins 112 000 folies. Puis, au Cégep, nos chemins se sont un peu séparés. Vous savez, cette amie que le jour où vous vous recroisez tout revient comme si de rien était, comme si vous vous étiez vu hier… Julie, c’est mon amie de même, avec elle c’est facile et elle sent beaucoup bon…
Julie est tombée amoureuse de son Sébastien il y a quelques années et de cet amour est arrivée Lilya-Carole, à peu près la plus belle cocotte que j’ai vue… Une blondinette mignonne comme tout. Tout semblait être parfait,

puis les mauvaises nouvelles sont arrivées, tumeur au cerveau et après mille affaires qui puent le cancer. Lily est ce qu’on appelle une warrior, c’est une petite miraculée de Sainte-Justine. En fait, ça dépend, depuis sa première tumeur grosse comme un oeuf au cerveau, elle déjoue les statistiques et les verdicts sans arrêt. Puis, lorsque Julie et Sébastien pensent avoir mis le cancer derrière, loin derrière, que plus rien n’apparait, que tout semble beau le salopard revient toujours de plus belle pour tuer la magie de la guérison. Imaginez les highs et les drops. Bye bye cancer ! Oh finalement tu étais juste parti prendre une marche et tu reviens nous gâcher la vie. La semaine passée, un nouveau verdict, Julie m’a texté, la colonne de sa cocotte est pleine de tumeurs et son cervelet aussi.
J’ai dû m’appuyer sur un mur pour ne pas tomber, comme parent, on le sent venir le petit rhume, on la voit venir la bronchite et ça nous fait mal au coeur… Depuis quelques jours, Lily avait recommencé à vomir, elle marchait un peu croche, ils le sentaient tous les deux que quelque chose clochait…La conclusion, rien pour guérir pour le moment, des traitements expérimentaux s’offrent peut-être à eux parce que cocotte a tellement été traitée pour plein de cochonneries qu’ils ne savent pas encore si elle a droit aux traitements expérimentaux. Oh finalement, c’est possible mais ça ne veut rien dire… Tsé quand être sur le qui-vive prend tout son sens. C’est un casse-tête et d’entendre les mots que Julie me disait me sciait en deux, ce sont des mots qu’on ne veut pas entendre de la bouche de gens qu’on aime, c’est trop gros, c’est trop horrible.
Lilya-Carole est toute petite, pourtant elle s’est battue tellement de fois contre ce qu’il y a de plus dur à battre.
Julie et Sébastien aussi. Se battre avec son enfant, c’est tellement ce qui rend l’humain le plus impuissant du monde. C’est de vouloir prendre la douleur sans pouvoir le faire. C’est de regarder son enfant en se disant à quel point il faut vivre le moment présent. Hier, ils étaient en train de faire un sapin dans le salon au mois de juin, « Elle aime tellement Noël qu’elle m’a dit… Parce qu’il est possible qu’elle ne se rende pas à décembre…»…
J’ai été une mauvaise amie Julie, je m’excuse. Depuis que Lily est née, j’ai fait ce que probablement plusieurs personnes ont fait. Je n’ai pas été là, j’ai été invisible. J’étais dans le combiné du téléphone, j’ai été sur les zinternets à te jaser tard, je t’ai croisée, mais j’ai évité ce qu’il y a de plus important dans ta vie. Je pense que j’ai essayé de fuir le problème, comme si, tant que je ne le voyais pas en vrai il n’existait pas pour vrai. Je me disais que tu avais besoin de gens solides autour de toi alors que lorsque je raccrochais avec toi et que j’essayais de rester forte je m’écroulais parce que pour moi, c’était juste injuste. J’ai pensé que je ferais partie de ton problème plutôt que de la solution. J’avais peur de voir ta cocotte en vrai et de me mettre à pleurer devant toi. Je fais le scénario dans ma tête à toutes les fois et tout ce que je vois, c’est que j’ai peur de ne pas à être à la hauteur de ta force.
Cette semaine j’ai raccroché et j’ai décidé que c’était assez, le cancer existe, il fait partie de ta vie et il ferait donc maintenant partie de la mienne. J’ai été une mauvais amie, ça me faisait mal à toutes les photos que je voyais de vous, à tous les vidéos que je regardais. La poitrine me serrait, parfois je gueulais dans un oreiller à l’injustice. Je voulais faire partie de la vie de ton enfant, je voulais qu’elle fasse partie de la mienne, j’avais peur que ça fasse trop mal, mais ce n’est pas moi qui doit partir se battre contre la maladie tous les jours, c’est elle, c’est vous. Je ne veux plus t’offrir juste mon oreille, je veux aussi t’offrir ma main pour te serrer fort, mes bras pour te faire un câlin, mon épaule pour accoter ta tête quand c’est trop dur… Je t’aime, je t’aime tellement xxx












